08 septembre 2006

 

L’avant-garde de la bêtise

Le débat sur la fusion GDF-Suez s’est ouvert hier à l’Assemblée. L’opposition a décidé d’en faire un cheval de bataille. C’est son rôle et, si cela correspond à des convictions réelles, c’est même son devoir. Malheureusement, quoiqu’on pense de cette fusion, la méthode choisie, l’obstruction parlementaire, est choquante.

Autheuil a bien décrit les stratagèmes qui seront mis en œuvre par les deux groupes de gauche et surtout a rappelé que le Président de l’Assemblée disposait de bien des pouvoirs pour contourner cette obstruction parlementaire. Son article permet de relativiser le pouvoir de nuisance de ceux qui jouent à l’obstruction. C’est utile.

Mais cela n’excuse en rien la bêtise de cette attitude. Pour en mesurer l’ampleur il suffit de jeter un œil sur quelques uns des 137 629 amendements déposés. Ils sont disponibles ici.

J’en ai trouvé deux qui valent leur pesant de cacahuètes :


1. Les amendements 115488 à 119425 déposés par les membres du groupe communiste. Ils concernent l’article 16 du projet de loi qui prévoit un délai maximal de 6 mois pour l’élection des représentants des salariés au CA.

Le 115488, déposé par M. Paul, vise à raccourcir ce délai à 180 jours.
Le 115489, déposé par M. Asensi est identique.
Etc…
Le 115509, déposé par M. vaxès est identique.

Puis,
Les amendements 115510 à 115531 déposés respectivement par les mêmes, visent à raccourcir ce délai à 179 jours.
Les amendements 115532 à 115553 déposés respectivement par les mêmes, visent à raccourcir ce délai à 178 jours.
Etc…
Les amendements 119404 à 119425 déposés respectivement par les mêmes, visent à raccourcir ce délai à 2 jours.

Comme c’est intelligent… On imagine avec délice les chaudes félicitations reçues par le brave conseiller parlementaire du groupe PC qui a eu une aussi bonne idée.


2. Les amendements 85990 à 88079, déposés eux aussi par les membres du groupe communiste (quelle surprise…)

Ces amendements visent à créer une exception à l’ouverture à la concurrence du marché de l’électricité pour toutes les communes qui ont la chance d’être situées dans la circonscription d’un coco. Bien entendu il y a un amendement par commune, ou plutôt 22 par commune car il y a 22 députés communistes (écrire cette phrase au présent… en 2006…) Marcillat-en-Combraille mérite ses 10 minutes de débat au parlement au moins autant que Flines-lez-Râches, Mehun-sur-Yèvre ou Porc-de-Bouc… Chez les communistes on ne transige pas avec l’égalité… du moins entre les membres du parti ! Car comment justifier l’inégalité avec les autres communes qui découlerait de ces amendements s’ils étaient adoptés ? S’agit-il d’une nouvelle version de la « double ration des cadres » ? La doctrine du Parti n’évolue pas vite.

Rien n’interdisait en effet aux députés de proposer des amendements concernant des communes hors de leur circonscription, puisqu’ils sont tous des « élus de la nation. » Les cocos ont donc raté une bonne occasion de déposer 36000 x 22 = 792 000 amendements ! Finalement, les conseillers parlementaires du Parti ne sont pas si futés.


Trêve de rigolade, tout cela est pathétique. Et le pire c’est que noyés au milieu de cette mer d’amendements imbéciles se trouvent sûrement quelques amendements qui mériteraient un débat approfondi… qui n’aura sans doute jamais lieu en raison de l’utilisation probable du 49-3. Voilà le beau résultat de l’obstruction parlementaire.

L’une des figures obligées de l’homme politique moderne consiste à donner des coups de menton en déplorant l’affaiblissement du parlement. Certains feraient mieux de se demander qui en est responsable.


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